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— Je n’ai nulle envie de dormir. À quel propos veux-tu que j’aille me coucher ?… J’aime mieux m’en aller voir les champs, ajouta Volinzoff en secouant les pans de son paletot.

— C’est bon ! va voir les champs, ami, va. Et Lejnieff se dirigea vers la chambre d’Alexandra Pawlowna. Il la trouva au salon ; elle l’accueillit d’un air aimable car la vue de Michaël lui faisait toujours plaisir, mais ses traits restèrent empreints de tristesse. Elle était demeurée soucieuse depuis la visite que Roudine avait faite la veille à son frère.

— Venez-vous de chez mon frère ? demanda-t-elle à Lejnieff ; comment se trouve-t-il aujourd’hui ?

— Mais il est fort bien ; il est allé visiter les champs.

Alexandra se tut.

— Dites-moi, de grâce, reprit-elle en examinant avec attention la bordure de son mouchoir de poche, ne savez-vous pas pourquoi…

— Pourquoi Roudine est venu ? interrompit Lejnieff. Je le sais : il est venu dire adieu.

— Comment ! dire adieu !

— Oui, ne le saviez-vous point ? Il quitte la maison de Daria.

— Il s’en va ?

— Pour toujours, c’est au moins ce qu’il dit.

— Mais comment comprendre cela après…

— Ah ! c’est une autre question. Il ne s’agit pas de