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pas ici, alors il a demandé Solomine ! « Je ne m’en irai pas sans ça, dit-il, parce que c’est pour affaire très-sérieuse. » Nous avons voulu le renvoyer, comme cette femme, en lui disant que Solomine non plus n’est pas là, qu’il est sorti ; mais le boiteux : « Je ne m’en irai pas, a-t-il dit, j’attendrai jusqu’à la nuit, s’il le faut ! » Et il se promène dans la cour. Tenez, venez par ici dans le corridor ; vous pourrez voir par la fenêtre si vous le reconnaissez, ce personnage-là. »

Marianne suivit Tatiana ; en passant près de Néjdanof, elle remarqua encore la contraction douloureuse de son front, qu’elle essuya de nouveau avec son mouchoir. Elle aperçut à travers les vitres poussiéreuses de l’étroite fenêtre le visiteur dont parlait Tatiana. Il lui était inconnu.

Mais en cet instant Solomine déboucha de derrière le coin de la maison. Le petit boiteux s’approcha vivement de lui, et lui tendit la main. Solomine la prit. Évidemment il connaissait cet homme. Tous les deux disparurent.

Mais des pas retentissent dans l’escalier… Ils montent…

Marianne retourna lestement dans sa chambre et s’arrêta au beau milieu en respirant avec effort. Elle avait peur… de quoi ? elle n’en savait rien elle-même.

La tête de Solomine apparut sur le seuil.

« Marianne, permettez-nous d’entrer chez vous. J’amène quelqu’un, qu’il faut absolument que vous voyiez. »

Marianne acquiesça d’un simple hochement de tête, et, à la suite de Solomine, vit entrer Pakline.