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Trouvant, en effet, dans les murailles rasées de cette époque d’excellentes fondations, on ne se sera pas amusé à les enlever péniblement et avec les plus fraudes difficultés pour en fonder de nouvelles, mais on s’en sera servi, après en avoir distrait toutes les tuiles qu’on aura pu obtenir entières, quoique je pense que le plus grand nombre de celles qu’on y rencontre n’aura été pris qu’en partie dans celles-ci, et en bien plus grande quantité dans les anciennes villas ou maisons des faubourgs, détruites à la même époque par les guerres intestines et celles des Bretons contre les Francs, ou mêmes par les Gallo-Romains eux-mêmes, qui auront renversé les monumens restés en dehors des enceintes militaires, soit parce qu’il fallait des matériaux tout préparés, soit pour éviter, qu’ils ne servissent de retraite aux ennemis. Tout annonce, effectivement, que ces fortifications furent faites rapidement, dans l’attente de nouvelles invasions de la part des Barbares.

Quant à l’objection que l’autel qu’on y a trouvé viendrait infirmer l’origine gallo-romaine de la muraille, en ce que c’eût été une sorte de sacrilège ou de profanation, elle est de peu de valeur[1], parce qu’on l’a rencontré à une hauteur qui était celle des constructions des viiie et ixe


    difficultés du terrain obligeaient souvent à déroger à la règle. (V. Cours d’Antiquité de M. de Caumont, Ère Gallo-Rom.) L’enceinte gallo-romaine de la ville de Reims avait la forme presqu’ovale de nos cités gallo-romaine, et était adossée à la petite rivière la Vesle, sur un terrain en pente. La même forme a été retrouvée, par M. Moet de Forte-Maison, dans l’enceinte de Noyon, laquelle diffère peu de celle de Rennes. Le circuit de la muraille d’Auxerre forme également, comme dans la dernière, une espèce de polygone irrégulier commandé par les localités. Enfin, l’enceinte gallo-romaine de Beauvais se rapproche aussi beaucoup de la forme de celle de Rennes, puisqu’elle offre un pentagone irrégulier, ou plutôt un parallélogramme, dont un des grands côtés serait remplacé par une ligne brisée, comme dans les côtés Nord et Ouest de Condate.

  1. Les populations malheureuses de cette époque, dit M. de Caumont, employèrent pour conjurer les nouveaux malheurs qui les menaçaient et se défendre, les débris de monumens somptueux et la pierre même des tombeaux, parce qu’aux termes de la loi romaine, la ville une fois prise par l’ennemi, les monumens sacrés cessaient de l’être, et que l’on pouvait en employer la pierre à toute espèce d’usage, parce qu’en outre l’enceinte murale était, d’ailleurs, un objet sacré et qu’elle pouvait recevoir des monumens funéraires. « Cum loca ab hostibus capia sunt, desinans omnia religiosa esse… Ideoque lapieds inde subiatos in quemlibet usum convertere possumus. » (Jac. de Gutherii, de Jure manium, lib. III.)