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Écoutez-moi. Dans ma longue vie, j’ai accumulé beaucoup de bouquins. Je prévois qu’un artiste comme Jules ne saura trop qu’en faire… et moi, il faut bien que je commence à plier bagage… Je connais un Israélite qui m’y aide, avec plaisir, et sans me tromper, parce que je sais le prix de mes denrées… Sur cette somme, dont j’ai déjà une part, nous trouverons de quoi établir ces enfants… Point de façons, point de murmures ; vous me feriez peine en me contrariant.. D’ailleurs j’y trouve une récréation. L’Israélite me tient compagnie… nous lisons de l’hébreu… nous comparons les éditions… et je dis adieu à mes bouquins un à un… en attendant que je vous dise adieu à tous, mes amis.

Je fondais en larmes. Henriette, sa mère, et jusqu’au géomètre, écoutaient avec surprise, le cœur gonflé d’admiration et de tendresse envers le bon vieillard. Bien éloignés d’accepter, nous ne le contrariâmes pas ; mais, nous étant rapprochés de lui, nous l’entourâmes de notre respect et des marques de notre gratitude profonde.




C’est ainsi que j’obtins la main de Henriette. L’avenir a accompli les prédictions de mon oncle et les promesses du géomètre. J’entrai dans une famille où régnaient l’union, l’intimité, le dévouement de tous au bien commun, la plus propre entre toutes à achever de former mon caractère, en me montrant quels sont les biens, simples à la vérité, mais vrais et certains, dont nous éloignent le plus souvent un tour d’esprit romanesque et une imagination prompte à se laisser séduire.

Lucy, avant de repartir pour l’Angleterre, apprit de