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le bourgeon qui fausse ses plaisirs, qui rétrécit son esprit, qui corrompt son cœur. Quand les passions ou les vicissitudes de la vie, quand les malheurs privés ou publics ne couvrent pas sa voix, il domine en maître et l’homme et la société ; les mœurs, les usages, les sentiments de chacun et de tous, se règlent sur sa volonté, ou varient selon ses moindres caprices. Alors les hommes s’isolent ou s’unissent, non pour de vrais griefs ou pour de saintes causes, mais en vertu de misérables avantages, en vertu des faux brillants qui les parent, des nippes qui recouvrent leur âme vide. Alors on les voit secouer leur poussière contre leurs égaux, uniquement épris du désir d’atteindre ceux qui les précèdent ; alors l’indifférence prend la place de la fraternité ; un envieux désir, celle de la sympathie ; et vivre, ce n’est plus aimer, jouir, c’est paraître !

Et si les temps comme les nôtres sont, par la mollesse du bien-être et par la pâleur des spectacles, propres à étendre cet empire du bourgeon, ils le sont encore par la tiédeur des âmes, par la nullité des convictions, et par ce leurre d’égalité dont se repaît une société folle dans ses vœux. Quelle place ne laissent pas au bourgeon, pour croître et se développer sans mesure, ces cœurs où nulle flamme ne couve, où nulle croyance n’a de racines, qu’aucune passion ne remue profondément ! Quelle vaste carrière ne lui ouvre pas ce principe d’égalité, interprété comme il l’est, prêché par ceux qui n’y croient ni ne l’acceptent, avidement reçu par ceux qui ne le comprennent pas, admis comme étant seulement le droit, le devoir, la fureur de s’égaler à plus élevé que soi ! Voyez-les se précipiter tous dans cette lice où, pour s’être coudoyés, froissés, mutilés, les uns n’en sont pas moins en tête, et les autres aux derniers