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parce que je suis resté petit peuple, soit parce que mon art m’y conduit.

Voilà deux choses nouvelles que je vous apprends, lecteur. L’une vous cause une impression désagréable, qui que vous soyez ; l’autre vous surprend, si toutefois, de ce que vous avez lu jusqu’ici de mon histoire, vous n’avez pas conclu déjà qu’Ostade et Teniers devaient m’attirer à eux plus que Grotius et Puffendorf. Mais je divise ces deux assertions pour en causer à part.




Auriez-vous oublié ce bourgeon qui est dans votre tête comme dans la mienne ? Je prends la liberté de vous le rappeler. Apprenez donc que nul ne se dit du petit peuple, ne se plaît à être du petit peuple, ni à y rencontrer ses amis. Et ne serais-je point un peu votre ami ? Qui que vous soyez, le petit peuple, dans votre bouche, c’est le peuple des échelons inférieurs à celui que vous occupez dans l’échelle de la société ; vous, vous n’en êtes pas ; et, à moins que votre vanité (le bourgeon encore) n’y trouve son compte, l’on ne vous verra point vous faire gloire d’être du petit peuple, en fussiez-vous. Apprenez cela.

À la vérité, si votre bourgeon, froissé par l’insolence d’un grand, s’apprête à le froisser à son tour, il pourra se faire qu’en ce moment vous tiriez gloire d’être du petit peuple, n’en fussiez-vous même pas ; mais ce n’est que pour un instant, et en ce sens seulement que le petit peuple a plus de savoir-vivre, de meilleures manières, un ton bien préférable à celui de ce grand-là, et qu’il le regarde comme infiniment au-dessous de soi.

Si pareillement votre bourgeon veut que vous présidiez un club, que vous soyez l’âme d’une émeute, le