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la nature ne serait-elle pas des millions de fois plus indifférente que nous aux calamités de tout notre troupeau, elle qui sait d’où nous venons et où nous allons, ce que nous ne savons pas ?

Aux agents qu’elle met en vibration pour nous donner la vie et la mort, il est facile de voir qu’elle ne nous reconnaît pas la valeur que nous nous prêtons pour des raisons toutes personnelles. Un animalcule mis en circulation par un spasme, et nous voilà sur la terre, un microbe mis en mouvement par un miasme, et nous voilà dessous. N’y a-t-il pas là de quoi faire les fiers ? Je sais bien qu’à en croire certains livres, le Dieu qui nous a créés est sans cesse occupé de nous et que nous avons une âme qui, moyennant certaines épreuves, rayonnera éternellement après notre mort, mais en attendant, nous avons horreur de cette mort, qui doit nous procurer une éternité de joies, et quand nous avons une rage