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L’homme n’avance, ne vit et ne sert autrui que lorsqu’il sait combien il s’est éloigné de la vérité et quand il se croit mauvais. Mais s’il cherche à justifier son péché, s’il est content de soi, il est mort. Or, être content de soi, en restant au service militaire, quand on sait qu’il a pour but le supplice et le meurtre, et, pour moyens, la soumission servile à chaque individu d’un grade supérieur qui, — demain même, — peut m’ordonner de tuer des hommes innocents, quand on sait que les conditions du service militaire sont non seulement l’oisiveté, mais la dépense stérile des meilleures forces du peuple, qui est trompé et dépravé ; quand on sait, dis-je, tout cela, on ne peut être content de soi.


§


Les derniers temps, ce ne sont pas les souffrances physiques qui me sont devenues terribles, mais les blessures morales, et parmi celles-ci, les plus aiguës sont les paroles de ceux qui emploient tous les moyens pour cacher la vérité et mettre à sa place le mensonge.

Le sophisme de l’objection de Pobiedonostzev[1] est le suivant : Nous permettons d’édifier des églises de toutes les confessions et d’y

  1. Dans sa réponse à une adresse de l’union évangélique suisse au Tzar, concernant la liberté de conscience.