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— Mais aujourd’hui vous ne pouvez pas, reprit Korsounskï.

À ce moment Vronskï s’approcha.

— Eh bien ! puisque aujourd’hui on ne peut se dispenser de danser, dansons, dit-elle en remarquant le salut de Vronskï ; et, rapidement, elle appuya sa main sur l’épaule de Korsounskï.

« Qu’a-t-elle contre lui ? » pensa Kitly remarquant qu’Anna, volontairement, n’avait pas répondu au salut de Vronskï.

Celui-ci s’approcha de Kitty, lui rappela sa promesse pour le premier quadrille et lui exprima ses regrets de n’avoir pas eu, depuis longtemps, le plaisir de la voir. Tout en lui parlant, Kitty regardait avec admiration valser Anna. Elle s’attendait à valser avec Vronskï, mais il ne l’invitait pas, et elle le regarda avec étonnement. Le jeune homme rougit et, hâtivement, l’invita ; mais à peine eut-il enlacé sa taille fine et fait les premiers pas, que la musique s’arrêta. Leurs visages étaient près l’un de l’autre, Kitty tourna vers lui son regard plein d’amour ; mais lui demeura impassible, et longtemps après ce jour elle fut obsédée par ce souvenir qui lui déchirait le cœur d’une honte ineffaçable.

— Pardon ! Pardon ! La valse ! La valse ! s’écria Korsounskï à l’autre bout de la salle et, enlaçant la première jeune fille qu’il rencontra, il se mit à danser.