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gagner leur vie, où la proximité des grands centres est plus grande, où l’instruction élémentaire est plus nécessaire, il y a plus d’écoles ; là où la population est plus clairsemée, plus agricole, il y en a moins. Deuxièmement, quand le peuple est le maître, il distribue les écoles de telle façon que les parents aient la possibilité d’en profiter pour leur argent, c’est-à-dire d’y envoyer leurs enfants. Les paysans des petits villages isolés dont la population totale est de trente à quarante âmes, — plus de la moitié de la population est répartie en de tels villages, — préfèrent avoir chez eux un maître bon marché qu’un maître très cher au centre de l’arrondissement où leurs enfants ne peuvent aller ni à pied ni en charrette. Étant donné cette répartition de la population, il en résulte que les écoles organisées par le peuple s’éloignent des modèles qu’on exige, mais elles prennent les formes les plus diverses et partout s’adaptent aux conditions locales. Dans un village, c’est un sacristain qui fait la classe à huit garçons, dans son propre logis, à raison de cinquante kopeks par mois. Ailleurs le petit village a loué un soldat à raison de huit roubles pour tout l’hiver et il vient dans les isbas. Ici un riche propriétaire a pris pour ses enfants un maître qu’il paie cinq roubles par mois et qu’il nourrit, et les paysans voisins s’adjoignent au propriétaire en versant au maître un supplément de deux roubles par enfant. Dans un grand village