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quelquefois sublimes, quelquefois bizarres, quelquefois grossiers, il y a la beauté pittoresque de la nature ? Est-ce que Henri IV avec sa profondeur d’esprit, son courage chevaleresque et calculé, sa grâce, sa bonté, sa ruse, ses appétits sensuels ; Louis XIII avec sa timidité gauche, son courage, sa soumission, sa révolte contre le puissant ministre auquel il doit la gloire de son règne ; Louis XIV avec sa vanité, son bon sens, sa grandeur ; Louis XV avec son égoïsme, qui s’étourdit sans s’aveugler ; est-ce que Richelieu avec son impitoyable génie, Mazarin avec sa patience et sa profondeur, Condé avec sa fougue que l’intelligence illumine, Turenne avec sa prudence qui s’enhardit, Villars avec son talent de saisir l’occasion, Frédéric avec son arrogant génie, Napoléon avec ce génie de Titan qui veut escalader le ciel, n’ont pas une beauté historique à laquelle ce serait crime de toucher, crime d’ajouter ou d’ôter un trait ? Pour les rendre que faut-il ? Les comprendre. Dès qu’on les a compris, en effet, on n’a plus qu’une passion, c’est de les bien étudier pour les reproduire tels qu’ils sont, et après les avoir bien étudiés de les étudier encore, pour s’assurer qu’on n’a pas négligé telle ride du malheur, du temps ou des passions, qui doit achever la vérité du portrait.