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τὸ πολεμεῖν) : je vais indiquer en outre les prétextes qui furent allégués de part et d’autre pour rompre les traités et passer à l’état de guerre. » (I, 23).

C’est la cause la moins avouée, celle qu’aucun des deux partis ne mettra en avant, puisque, ne faisant pas éclater en évidence l’injustice du parti adverse, elle ne rend rien à la rhétorique des jugements. Mais tous les plans de la causalité sont ménagés avec l’essentiel de leurs rapports dans cette seule phrase synthétique. L’accroissement de la puissance d’Athènes, c’est la volonté d’hégémonie inhérente à l’être d’une puissance maritime. Thucydide ne dit nullement que les Lacédémoniens voulussent cette hégémonie pour eux. Ils croient, eux et leurs alliés, principalement Corinthe, faire une guerre défensive inévitable, et précisément parce qu’ils jugent cette guerre défensive inévitable, ils en choisissent le moment et paraissent dès lors les agresseurs. Ce sont eux qui rompent le traité, déjà tiraillé et distendu par les Athéniens depuis que les affaires de Corcyre et de Potidée avaient commencé. Ils voyaient les Athéniens, tout au moins dans un avenir imminent a commander à la plus grande partie de la Grèce ». (I, 8). Ayant laissé se former l’empire athénien jusqu’au moment où il est devenu une menace pour l’indépendance de toutes les cités « ils se décidèrent à réunir toutes les forces pour l’abattre, si possible » (I, 118).

Dès lors le problème de la responsabilité d’une telle guerre ne se pose pas, ou du moins constitue une coupe arbitraire sur un problème plus général et plus vrai. Ce sont les Lacédémoniens qui ont déclaré la guerre, mais les Athéniens auraient aussi bien pu la déclarer sans que les rapports essentiels reconnus par l’histoire eussent été changés. Les Corcyréens parlent aux Athé-