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conise la tactique qui fera pendant la guerre des progrès continuels. Assiégeant les quatre cents hoplites de Lacédémone (avec leurs ilotes), des hoplites athéniens en nombre double n’aboutissent à rien. Cléon submerge la campagne de l’île sous huit cents archers et huit cents peltastes. Deux archers et deux voltigeurs par hoplite ennemi, sans compter des auxiliaires messéniens et les huit cents hoplites d’Athènes. Thucydide, dans sa préoccupation d’enlever tout honneur à Cléon, dit que ce plan d’attaque était celui que Démosthène avait conçu précédemment. Et certainement il a raison. Démosthène, depuis sa malheureuse campagne d’Étolie, savait par expérience que les hoplites ne valaient rien dans un terrain montagneux, et il préconisait sans cesse l’emploi de troupes légères. À Pylos, où il avait gardé longtemps une certaine indépendance, il s’en était procuré le plus possible, mais il n’en avait pas encore assez. Le plan d’attaque de Démosthène ne pouvait être réalisé que grâce au très important contingent de peltastes et d’archers qu’amenait Cléon ; Cléon, en conservant son commandement à Démosthène, approuve son plan que sans doute il connaissait déjà à Athènes et qu’il y avait fait sien, et, maintenant qu’il lui a procuré les ressources nécessaires, s’entend avec lui pour mettre ce plan à exécution. Cléon n’aurait-il eu que le mérite de défendre à Athènes la tactique de Démosthène et de s’employer, à Athènes et à Pylos, à la faire réussir, c’en est assez pour lui assurer une grande part de la victoire. Ses renforts doublaient au moins ou plus probablement triplaient le nombre des troupes légères dont disposait Démosthène. Toutes les conditions étaient donc réunies pour qu’il pût tenir sa promesse, réunies en partie par lui, et on peut fort