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alliance demeurent avec elle sur le pied de parfaite égalité. Sparte n’entre en guerre que pour se défendre et défendre ses alliés contre les prétentions de la thalassocratie athénienne à la domination de la Grèce.

Athènes n’a à ses côtés que des alliés forcés et des tributaires sur qui elle exerce une domination dure, quinteuse, humiliante. Seuls viennent à elle librement les ennemis de ses ennemis, les Platéens, ennemis de Thèbes, les Messéniens de Naupacte, ennemis de Sparte, les Corcyréens, ennemis des Corinthiens. « L’animosité contre les Athéniens, dit Thucydide, était grande, les uns voulant se soustraire à leur domination, les autres craignant de la subir. » (II, 8). Au contraire, au début de la guerre, l’opinion générale est pour les Lacédémoniens « surtout depuis qu’ils avaient annoncé l’intention d’affranchir la Grèce ». Tous les peuples sages et modérés se rangent de leur côté. Ils ont pour eux les deux pouvoirs spirituels, Delphes et Olympie, ainsi que la Suisse de la Grèce, je veux dire la juste et paisible Achaïe. Si, des terrasses de Delphes ou de l’Altis d’Olympie, nous appelons bien ce que la cité antique, prise dans sa généralité idéale, doit appeler bien, et mal ce qu’elle doit appeler mal, nous sommes laconisants du même fonds dont Montaigne, citoyen romain, était pompéien. Mais son adhésion au « bon parti » n’empêchait pas qu’il n’admirât aucun homme plus que César.

Les Corinthiens, lorsqu’ils font décider la guerre par les Péloponésiens, instituent, dans le discours que leur prête Thucydide, un brillant parallèle entre Sparte et Athènes. Ce parallèle se ramène à cette idée, à cette charpente essentielle que Sparte c’est la stabilité, Athènes la mobilité. Alors comme en d’autres temps, tous les jugements découlent de ces deux caractères, le