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où elles cherchaient leur nourriture. De là une guerre générale sur terre et sur mer qui devait s’étendre, comme celles de Napoléon et de 1914, sur un espace de plus en plus étendu, — une guerre exhaustive qui, malgré la raison de ceux qui voyaient les deux partis courir également à leur ruine, et, après le vaincu sous sa défaite, le vainqueur s’ensevelir sous sa victoire, ne pouvait se terminer que par la chute de l’une ou de l’autre tête.

Et de là aussi ce caractère symétrique qui apparaît dès la première année de la guerre, comme les mouvements des joueurs dans les deux camps d’un jeu de barres. Aux incursions des Péloponésiens dans le territoire de l’Attique, répondent les incursions maritimes des Athéniens sur les côtes du Péloponèse. À l’occupation de Pylos par les Athéniens répond celle d’Amphipolis, puis de Décélie, par les Lacédémoniens. À peu près vers la même époque où les Athéniens s’engagent dans les affaires de Sicile pour couper aux Péloponésiens leur principale source de puissance éventuelle, les Lacédémoniens se mettent à fonder une colonie au point le plus inquiétant pour Athènes, Héraclée en Trachinie. C’était, aux pieds des grandes forêts de l’Œta, une belle place pour un chantier naval, proche de la Doride leur mère patrie, et au point où la tradition plaçait le berceau d’Hercule, héros de leur race. De là on menaçait à la fois l’Eubée et la Thrace. Entre Héraclée et les Thermopyles ils établissent de vastes chantiers maritimes. Mais la colonie ne réussit pas. Elle est compromise par la maladresse et la brutalité des gouverneurs spartiates, et finalement ruinée par les Thessaliens. Les guerres d’Espagne et de Russie sous Napoléon, les expéditions des Dardanelles, de Salonique, de Mésopotamie, sont