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traités durement par des Grecs de même race et se souviennent avec amertume qu’à l’origine tous les alliés étaient égaux. Haines de race et d’influence avec les Lacédémoniens, Doriens orgueilleux « qui regardaient les Athéniens comme appartenant à une race étrangère ». Haines commerciales avec les Corinthiens.

Évidemment on peut discerner dans la formation de l’empire athénien un ordre, celui qui est indiqué par la direction générale du commerce. La ligne vitale de l’empire est celle d’où dépend le ravitaillement d’Athènes, le grand central Pirée-Amphipolis dans lequel Lacédémone donnera les deux formidables coups d’Amphipolis et de Décélie. Il semble naturel que cet intérêt prime les autres. Mais le caractère le plus frappant de la guerre, c’est l’universalité du champ de bataille, l’insistance athénienne à multiplier partout des théâtres de lutte, Grèce occidentale, Acarnanie, Thrace, îles. La guerre de Sicile, qui paraît mobiliser toutes les forces d’Athènes, ne l’empêche pas de soutenir la guerre ailleurs. Pareillement, l’expédition d’Égypte avait été comme une première épreuve de l’expédition de Sicile, menée avec une grosse perte en même temps que la guerre contre Corinthe, les Éginètes, les Péloponésiens, celle de Thessalie, et au moment où Athènes occupant temporairement la Béotie, cherchait vainement à constituer sous son hégémonie une Grèce du Nord qui balançât le Péloponèse lacédémonien. Ce sont bien les Athéniens dont parlent les Corinthiens à Sparte, « faits pour ne jamais être en repos et n’y jamais laisser les autres ».

Il faut tenir compte ici probablement d’un excès d’élan vital, analogue à celui qu’il y eut en France dans les dernières années du xviiie siècle. Songeons qu’il