Page:Thibaudet - La Campagne avec Thucydide, 1922.djvu/117

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

CHAPITRE IV

L’IMPÉRIALISME

Les nécessités de la politique athénienne sont résumées dans une phrase du discours d’Alcibiade que j’ai déjà citée en partie, une de ces phrases cruciales comme Sorel, pour faire tourner lumineusement sur elles tout un pan de l’histoire, en isole volontiers d’un discours de Danton ou d’un rapport de Cambon. « Avec de puissants adversaires il ne s’agit pas seulement de repousser leurs attaques, mais de les prévenir. Nous ne sommes pas libres de modérer à notre gré notre volonté de commander, mais force nous est, une fois arrivés au point où nous visions, de menacer les uns, d’en imposer aux autres, car nous serions en danger d’être dominés si nous-mêmes ne dominions pas. Et vous ne sauriez considérer le repos du même œil que les autres, à moins de vous gouverner par les mêmes idées. » (VI, 18).

Voilà le mouvement élémentaire, l’essence et la nécessité permanente de toute politique impérialiste. Quand les armées de la Révolution envahissent la Hollande ou la Suisse, quand celles de Guillaume II entrent en Belgique, quand l’Angleterre s’installe durablement en Égypte et en Perse, elles réalisent le plan marqué par cette épure. Au commencement d’une politique impérialiste est l’action ; à son commencement, en son