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les stations de Salamine et de Minoa. Il est dès lors naturel que l’État continental, qui ne voit dans les marines neutres qu’un renfort pour ses ennemis, les détruise ou les empêche de naviguer s’il le peut. De là cette guerre aux neutres faite par les Lacédémoniens, pareille à ces autres guerres aux neutres que furent la guerre sous-marine des Allemands et le blocus continental de Napoléon, système pareil de ruine pour les marines réputées solidaires de la marine ennemie.

La possibilité pour les maîtres de la mer d’exercer le blocus maritime appelle naturellement chez la puissance prépondérante sur terre la tentation et la tentative d’un blocus continental. Le cas ne s’est point réalisé en 1914 puisque les puissances bloquées par mer étaient également encerclées par terre. Mais, comme Napoléon, Lacédémone est conduite à employer le procédé d’un blocus continental contre la puissance maritime d’Athènes. Cette idée se réalise en trois étapes.

Au début de la guerre elle prend sa figure la plus simple de bataille, attaque et riposte sans manœuvre. Les Lacédémoniens sont maîtres de la terre et les Athéniens de la mer. Chaque année les Lacédémoniens viennent s’installer en Attique et la ravager. Chaque année, en la bonne saison de la navigation, la flotte athénienne fait le tour du Péloponèse et en dévaste les côtes. Cette guerre de razzia, analogue à celle des tribus nomades aux sédentaires, peut durer indéfiniment sans résultat, au contraire de ce qu’on pensait d’abord des deux côtés.

Un blocus permanent prenant pour objet un point vital de la puissance ennemie représentera un progrès de manœuvre. C’est ce que comprend, la septième année de la guerre, la meilleure tête militaire qu’eussent alors