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XV
LAMENNAIS ET LA LITTÉRATURE RELIGIEUSE
Le problème
de la Littérature religieuse
.
L’échec religieux de la Révolution, le Concordat, le Génie du christianisme surtout, posaient au début du siècle le problème d’une Littérature catholique. La défense de la foi, la reconstitution de la société sur des bases chrétiennes, la réaction contre la philosophie du XVIIIe siècle, la contre-Révolution, seraient-elles portées, aidées, propagées, rendues vivantes et actives pour le cœur et la raison, par un puissant mouvement intellectuel et littéraire ? Le clergé reprendrait-il dans les lettres chrétiennes cette place d’avant-garde qu’il occupait avec les grands hommes d’Église du XVIIe siècle ? Ou bien le génie du christianisme resterait-il, comme il l’était avec Chateaubriand, un génie laïque ? S’adresserait-il aux sens ou à la raison ? La pensée chrétienne chercherait-elle à conquérir le pouvoir par la contre-Révolution, comme les idées philosophiques l’avaient conquis par la Révolution ? Des réponses ardentes et contradictoires concernèrent ces questions. On remarquera qu’il y a eu en France trois grandes époques de littérature catholique originale, la première qui remplit le XVIIe siècle, va de Saint-François de Sales à Massillon, la deuxième va de la Révolution à 1870, la dernière commencera à la séparation de l’Église et de l’État et dure encore.

C’est la survivance d’un vaincu et de deux orateurs. Lamennais, Montalembert et Lacordaire qui nous fait prolonger cette deuxième période jusque sous le Second Empire. Mais littérairement sa sève, son originalité, sont à peu près épuisées dès 1833, après la condamnation de l’Avenir.