de la Paternité.
Non seulement parce que le Père Goriot contient déjà la plupart des personnages-clefs de Balzac, Vautrin, Rastignac, Bianchon, le ménage Nucingen, mais parce que le Père Goriot, c’est d’abord le personnage du titre, et le mystère de la paternité. Montaigne disait qu’il aimait mieux avoir un enfant de l’accointance des Muses que de celle de sa femme. Mais la seconde des deux accointances est le symbole charnel de la première, comme la tradition fait symboliser par le couple du Cantique des Cantiques l’union de Dieu et de son Église. Le Père Goriot ne pouvait être créé que par le père du Père Goriot, le « Christ de la paternité » par le génie de la paternité et la paternité du génie. « Quand j’ai été père, dit Goriot, j’ai compris Dieu ». Voilà un mot extraordinaire qui nous met aux sources de la création balzacienne. La présence de Dieu, le consentement à Dieu sont aussi évidents, aussi nécessaires, aussi absolus dans l’œuvre de Balzac, pleine comme un jour de la création, que l’absence, l’inexistence de Dieu dans l’œuvre de Proust, procès-verbal d’un monde qui se détruit. Concurrence à l’état civil est le terme extérieur et conventionnel qui implique, dans l’intérieur et dans le réel, la collaboration avec le Créateur, et cette Imitation de Dieu le Père latente dans la Comédie Humaine.
Goriot est un vaincu de la paternité, parce que père selon la chair, père selon les individus, père selon l’égoïsme. Le terme de « Christ de la paternité », s’entend de sa passion, de ce que lui font souffrir les deux filles pour lesquelles il s’est fait victime holocauste. Il a aimé ses filles totalement, puissamment, esclave de leurs volontés et de leurs passions, et c’est