conque qui fût appropriée au sujet, et dont le développement s’appuyât dans toutes ses parties sur le développement de l’événement qu’elle raconterait, en substituant aux couleurs usées et fausses de la mythologie païenne les couleurs neuves et vraies de la théogonie chrétienne, on pourrait jeter dans l’ode quelque chose de l’intérêt du drame, et lui faire parler en outre ce langage austère, consolant et religieux dont a besoin une vieille société qui sort encore toute chancelante des saturnales de l’athéisme et de l’anarchie. »
Ces lignes de la préface de 1822 sont parfaitement lucides. Il s’agit de faire plutôt que de dire quelque chose de nouveau, de donner un modèle de l’ode animée par une seule « idée », de développer, de transporter dans des vers la matière et l’esprit du Génie du Christianisme, d’adresser à la société de la Restauration non ce que le poète a besoin de dire, comme Lamartine et Vigny, mais ce que cette société a besoin d’entendre ou plutôt désir d’entendre, ce qu’elle demandera au théâtre et à la tribune, et ce que l’ode, en attendant le théâtre et la tribune qui conviendraient mal au débutant de vingt ans, s’efforcera, avec ses moyens propres fort intelligemment compris, de lui donner. Déjà, situation d’une poésie plus que présence d’un poète.