Page:Tchékhov - Salle 6, trad Roche, 1922.djvu/93

Cette page n’a pas encore été corrigée

trop longue, et la capote sentait le poisson fumé.

– Vous guérirez, grâce à Dieu ! répéta Nikîta.

Il prit à brassée les habits d’André Efîmytch, sortit et referma la porte derrière lui.

– Tout m’est égal…, pensa André Efîmytch, s’enveloppant avec honte dans sa capote et se rendant compte que, dans son nouveau costume, il ressemblait à un prisonnier. Tout m’est égal… Un frac, un uniforme, ou cette capote ?… Tout m’est égal…

Mais qu’était devenue sa montre ? Et le portefeuille qui était dans sa poche de côté ? Et ses cigarettes ? Où Nikîta emportait-il ses vêtements ?… Maintenant jusqu’à la mort il ne lui arriverait peut-être plus de mettre ni pantalon, ni gilet, ni bottes… Tout cela lui sembla étrange et même incroyable au premier moment. André Efîmytch restait convaincu qu’entre la maison de Mme Biélôva et la salle 6 il n’y avait aucune différence, et que tout en ce monde est absurdité et vanité des vanités, et cependant, ses mains tremblaient, ses pieds étaient glacés, et il lui était pénible de songer qu’Ivan Dmîtritch allait se dresser sur son lit et le voir en capote de malade.

Il se leva, fit quelques pas et se rassit.

Voilà qu’il était là depuis une demi-heure, une heure, et il s’ennuyait à mourir. Était-il possible de passer là un jour, une semaine, des années,