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– Vous n’y croyez pas ; moi j’y crois ! Quelqu’un, Dostoïevsky ou Voltaire, a dit que s’il n’y avait pas de Dieu, il faudrait l’inventer. Et moi je crois fermement que si l’immortalité n’existait pas, le grand esprit de l’homme l’inventerait tôt ou tard.

– C’est bien parlé, dit André Efîmytch, souriant de plaisir. C’est bien de croire ! Avec une pareille croyance on peut vivre en chantant, même emmuré. Vous avez certainement dû recevoir de l’instruction ?

– Oui, j’ai suivi les cours de l’Université, mais je n’ai pas été jusqu’au bout.

– Vous êtes un homme de méditation et de pensée ; où que vous soyez, vous pouvez trouver en vous-même les raisons de vous consoler. Une pensée libre et profonde menant à la compréhension de la vie, et le complet mépris de la stupide vanité du monde, ce sont les deux biens les plus élevés que l’homme puisse connaître. On peut les posséder, même enfermé sous triple grille. Diogène dans son tonneau était plus heureux que tous les rois de la terre.

– Votre Diogène était un idiot, répondit sombrement Ivan Dmîtritch… Que me parlez-vous de Diogène et d’une sorte de compréhension ? fit-il soudain, s’emportant, et sautant à bas de son lit. J’aime la vie ; je l’aime passionnément ! La monomanie