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Elle allait avec des officiers au restaurant, et ce n’était pas pour y boire du porto ou quelque chose de plus doux. Elle tâchait d’attraper du cognac, pour que ça la brûlât, pour que ça lui ôtât l’esprit.

– Oui, elle était excentrique… Ce que j’en ai subi avec elle !… Tout d’un coup, quelque chose ne lui allait pas et elle commençait à être nerveuse… Et ensuite, qu’est-il arrivé ?

– Une semaine passe, une autre. J’étais chez moi en train d’écrire ; tout d’un coup, la porte s’ouvre et elle entre, ivre. « Reprenez, me dit-elle, votre maudit argent ! » Et elle me jette le paquet à la figure. Elle n’en pouvait plus, autrement dit… Je ramassai l’argent ; je le comptai : il manquait cinq cents roubles. Elle n’était arrivée à dépenser que cinq cents roubles…

– Qu’avez-vous fait de l’argent ?

– Vieille affaire, il n’y a pas à s’en cacher… Je l’ai pris, parbleu ! Qu’avez-vous à me regarder comme ça ? Attendez encore ce qui viendra. C’est tout un roman, c’est de la psychiatrie ! Environ deux mois après, je rentre une nuit chez moi, ivre, mauvais… J’allume, je regarde. Sur mon divan est assise Sôphia Mikhâilovna, ivre elle aussi, l’esprit tout à l’envers, l’air hagard, exactement comme si elle sortait de Bedlam. « Rendez-moi mon argent, me dit-elle ; j’ai changé d’avis ! Tant qu’à