Page:Tchékhov - Salle 6, trad Roche, 1922.djvu/122

Cette page n’a pas encore été corrigée

cesse Varvâra pour lui demander quelque chose, et elle, l’air effaré, essoufflée, courait dans la cuisine, où depuis le matin travaillaient le cuisinier de Kostioukov et la cuisinière des Khrymine jeunes. Akssînia, frisée, en corset, sans robe, avec des bottines neuves qui criaient, volait dans la cour comme un tourbillon ; on ne voyait que ses genoux nus et sa gorge. On entendait du bruit, des injures et des jurons.

Les passants s’arrêtaient devant les portes grandes ouvertes et on sentait en tout qu’il se préparait quelque chose d’inaccoutumé.

– On est parti chercher la fiancée ! annonça-t-on.

Le bruit des grelots au delà du village s’épandait et mourait… Vers trois heures, les gens se précipitèrent, les grelots tintèrent de nouveau : on amenait la fiancée !

L’église fut pleine. Le grand candélabre était allumé ; les chantres, comme l’avait désiré le vieux Tsyboûkine, chantaient sur de la musique imprimée. L’éclat des lumières et des robes voyantes aveuglait Lîpa. Il lui semblait que les chantres, de leurs voix tonnantes, lui frappaient sur la tête comme avec des marteaux. Le corset, que pour la première fois de sa vie elle mettait, et ses souliers la gênaient. Elle avait l’air de revenir à peine d’un évanouissement, de regarder et de ne pas comprendre. Anîssime,