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Saint-Père, je vous ai trompé ; je n’ai pas vingt-quatre ans, mais bien vingt-cinq ans et deux mois et demi. Pardonnez-moi, pardonnez-moi.” Le Saint-Père la releva avec bonté et, s’efforçant de contenir d’un signe l’hilarité générale qui éclatait parmi les assistants, il rassura la pauvre dame et l’engagea à ne plus manquer à la vérité, fût-ce pour des bagatelles.

Pie IX allait un jour visiter l’hôpital de Saint-Jean de Latran et l’hospice des aliénés ; une foule immense le suivait en criant : “Vie Pie IX, vive le Pontife martyr !” Parmi cette foule se trouvaient plusieurs soldats français, et au moment où le Pape descendait de voiture à la porte de l’hôpital, un d’entre eux s’écria : “Oh ! que je serais heureux s’il m’était donné de baiser les pieds de ce saint vieillard ! ” Le Pape l’ayant entendu et se tournant vers lui : “Viens ici, mon cher fils, lui dit-il ; tiens, voilà mes mains que je te donne à baiser.” Le brave militaire, tombant aussitôt à genoux et profondément ému, presse respectueusement les mains sacrées du Pontife, et les couvre tout à la fois de baisers et de larmes. À cette vue, des larmes d’admiration et de tendresse vinrent, aux yeux de tous les assistants, et Pie IX, pour cacher son émotion, se hâta de se soustraire aux regards, non sans être accompagné des plus vives acclamations.

Dans le cours de 1855 ou 1856, un jeune soldat, qui apparemment, n’était pas beaucoup au courant des formalités et du cérémonial à remplir pour être reçu chez le Pape, se présenta au Vatican, disant qu’il avait une affaire importante à communiquer à Pie IX. Le Pape était occupé. Cependant, à force d’instances et de supplications, le jeune soldat obtint la faveur qu’il sollicitait.

“Qu’avez-vous donc à me confier, mon ami ? lui demanda Pie IX avec bonté. — Mon Pape, je vais vous satisfaire, répondit le soldat d’un air assez gauche et en faisant un grand salut militaire. Hier, j’ai reçu une lettre du pays. Voyez-vous, il y a là au pays, un camarade qui a eu l’honneur d’être reçu par vous ; il a même une médaille que vous lui avez donnée, et tous les huit jours il réunit les gens du village pour leur parler de Rome, de Saint-Pierre, des catacombes et surtout du Saint-Père. Il intéresse tant le monde que le curé prétend qu’il vaut un prédicateur. Eh bien ! mon Pape, tout le village a voulu avoir une messe dite à son intention, et par vous. Tiens, m’a-t-on dit dans la lettre, tu iras trouver le Pape, tu lui demanderas une messe ; mais surtout tu la payeras. Voici quarante sous, mon Pape.” Et en disant ces mots, le soldat tirait une majestueuse