Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 3.djvu/407

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

femme. Il fut mal conseillé, car il faut tout prévoir en tel cas ; il n’avoit qu’à tout porter à l’Arsenal.

Elle voulut donner en haine de ses enfants cinquante mille écus à madame de Montausier, la voyant en faveur. Madame de Montausier les refusa, et lui dit : « Hé ! madame, vous avez tant de grandes filles qui n’en ont pas trop. » Elle a fait depuis de fort impertinentes donations entre-vifs, comme vingt mille livres à Ferrand, doyen du parlement, afin qu’il sollicitât pour elle.

Mademoiselle de Clisson, troisième sœur de madame de Montbazon, est une personne qui n’a de défaut que de n’avoir pas de santé. Quoique maltraitée de sa mère, elle ne voulut point assister à l’inventaire de ses biens, et empêcha qu’on ne l’enlevât et qu’on ne l’interdît ; mais elle travailla pour faire casser le mariage : ce qui fut exécuté. Le frère aîné, qui a gagné mademoiselle de Vertus, n’a jamais pu la gagner. Elle et ses sœurs et le comte de Goetlo plaident contre l’aîné, qui ne leur veut rien donner, et les fait enrager aussi bien qu’il fait enrager sa femme. Cette femme a de la vertu, et, par modestie, elle ne l’a point voulu accuser d’impuissance.

Elle conte ainsi la mort du galant de sa mère. Le comte de Vertus étoit un fort bon homme, et qui ne manquoit point d’esprit. Son foible étoit sa femme ; il l’aimoit passionnément, et ne croyoit pas qu’on pût la voir sans en devenir amoureux. Un gentilhomme d’Anjou, appelé Saint-Germain La Troche, homme d’esprit et de cœur, et bien fait de sa personne, fut aimé de la comtesse. Le mari, qui avoit des espions auprès d’elle, fut averti aussitôt de l’affaire. Il estimoit Saint-