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comme Minerve de celui de Jupiter. Teniers, en effet, peignoit fort vite ; et jamais fatigué par les soins qu’exige un extrême fini, il sentoit mieux, il rendoit mieux le mouvement général.

Il a quelquefois une espèce de noblesse, comme dans son tableau de l’Enfant Prodigue, et dans celui des Sept Œuvres de Miséricorde : mais habile peintre partout, c’est principalement lorsqu’il peint des hommes du peuple passionnés qu’il est génie plus original ; il est surtout sublime quand il offre les cabarets et les buveurs : c’est dans ces sortes de sujets que véritablement inspiré, il présente au spectateur la nature en traits de flamme. Voyez au Muséum des tableaux représentant l’intérieur d’un estaminet : en regardant les joueurs, les sacs à bière qu’on y voit, on se dit : « Si de tels hommes, sous des lambris dorés, étoient revêtus d’habits élégans et magnifiques, ils auroient toujours l’air de joueurs et d’ivrognes. »

L’originalité de son talent est si marquée, que les yeux les moins exercés reconnoissent ses tableaux au premier aspect ; et les artistes n’en voyant qu’une pipe, reconnoîtroient qu’elle appartient à une figure de Teniers.