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tient à l’adresse de la main plutôt qu’à la justesse, à la beauté, à la noblesse des pensées et à la profondeur de la science. Cette manière, toute estimable qu’elle peut-être sous certains rapports, a beaucoup contribué à corrompre le goût en Italie, et surtout en France, en donnant une importance première et presque exclusive à cette espèce de talent. Pendant un certain temps, pour prouver la beauté d’un tableau, il suffisoit de s’écrier : « Ah ! que c’est bien fait ; » après ces mots on ne pouvoit rien ajouter, l’éloge étoit complet ; ils ne vouloient cependant pas dire : « Les clairs, les demi-teintes, les ombres sont bien à leur place ; le dessin est noble et correct, la couleur est belle, tous les objets ont la vérité de pensée et d’imitation qu’ils doivent avoir. » Non, non, ces paroles sacrées ne vouloient rien dire de cela ; elles n’avoient d’autre intention que d’assurer que l’ouvrage étoit peint facilement, avec une touche hardie ; ce qui, le plus souvent, signifioit qu’il étoit hardiment mauvais : celui qui avoit le plus ce rapide mérite passoit pour le plus habile. Hélas ! cette séductrice facilité a quelquefois égaré le jugement de beaucoup de gens instruits et rai-