Page:Taillasson - Observations sur quelques grands peintres, 1807.djvu/162

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

son véritable caractère : si on le jugeoit d’après son fameux tableau du martyre de Saint Pierre Dominiquain, on prononceroit un jugement qui ne seroit pas juste pour ses autres ouvrages. Il y a dans cette étonnante production, un mouvement, un enthousiasme, qu’on ne retrouve guère dans tout ce qu’il a peint, soit que le sujet l’ait plus exalté qu’à son ordinaire, soit qu’un moment brillant de santé ait donné plus de ton à son génie ; aucun tableau d’aucun autre maître n’est pensé ni exécuté avec plus de feu et de véhémence ; aucun n’offre des expressions plus justes, plus vives que celles des figures de cette hardie conception qui, dans cette partie, est égale aux plus belles des peintres les plus brûlans : mais ce n’est pas sur un seul ouvrage qu’on doit fixer le caractère distinctif du talent d’un artiste, surtout lorsqu’il en a fait beaucoup. Doit-on déterminer le caractère du style des tragédies de Corneille sur les scènes amoureuses et touchantes du Cid ? En général, les tableaux du Titien excitent l’admiration, bien plus que l’enthousiasme ; ils sont le produit d’un bon esprit, d’une âme belle et paisible, d’un homme savant, exécutant avec facilité, et environné dans ses travaux de la