Page:Taillasson - Observations sur quelques grands peintres, 1807.djvu/121

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

par les luthiers des grandes villes ; et s’ils sont inspirés, ce n’est point par les jeunes driades. Il n’a pas donné aux bœufs la bonté vénérable, la majesté patriarcale de ces rois des pâturages. Ses vaches, ses chèvres, sont des coquettes toutes remplies d’agrément ; ses moutons ne sont point les bonnes et innocentes bêtes, dont Paul Potter a si bien rendu l’attachante naïveté ; ce ne sont que de jolis petits maîtres : ses ânes même sont des petits maîtres ; et il ne leur a pas donné leur simplicité et la patiente résignation à tous les emplois dont on les fatigue, que mal à propos les hommes ont appelé bêtise.

Sans doute l’extrême promptitude qu’il mettoit à faire ses tableaux ; sa gaieté, sa sorte d’insouciance en y travaillant l’ont empêché de les approfondir autant qu’il auroit pu faire en y mettant plus de temps : mais aussi cette abondance, cette facilité, cette preuve puissante de son aptitude extraordinaire pour son art, font le charme de son talent, et deviennent un de ses caractères les plus marqués. Les sujets où il a le mieux réussi, et qu’il a faits souvent, sont des marches de troupeaux ; il les a peints quelquefois traversant des ruisseaux et des rivières au cou-