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cet exilé de toutes les fêtes, c’était Paul Verlaine, — Paul Verlaine, le plus grand poète du XIXe siècle, sans excepter Victor Hugo !

Nos relations personnelles datent de 1883 — trente-six ans, long espace de nos âges mortels ! — elles remontent à Lutèce, au petit cénacle des Hydropathes ou buveurs d’eau, fondé par Émile Goudeau, qui mourut alcoolique, aux symposium du Café Procope, du Soleil d’Or et du Mercure de France, alors à son aurore.

Poor Lélian revenait, escorté d’une légende saturnienne où l’Envie et la Sottise avaient collaboré pour la plus grande part. M. Henry Fouquier, en prononçant le nom du poète, faisait à peu près la même grimace qu’en prenant une bûche au baccara.

Mais l’animadversion des pleutres, la haine des lâches et des imbéciles, tant de mensonges accumulés grandissaient encore à nos yeux ce revenant de la douleur et de l’exil. Une légion thébaine s’était formée autour de lui, aveugle et sourde à tout ce qui n’était pas la gloire du poète. Nous l’aimions. À ses côtés prenaient place quelques jeunes hommes