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Il n’est pas jusques aux vieilles dames dont quelque espoir ne passemente les souliers avachis. Ma tante Viaud se délecte pour un songe qui redresse en fuseaux ses rotules cagneuses. Jean Lorrain imagine qu’il centralise enfin, dans sa belle patrie, l’amour unisexuel et que, sous une chape d’améthyste et d’or, il devient pape des Urniens.

Mais les triomphateurs de cette nuit charmante sont Messieurs les épiciers, prestidigitateurs de la mélasse, illusionnistes du saindoux. Les abricots au navet, les pralines d’arachide et les marrons placés au sucre diabétique battent leur plein au sein du réveillon. Noël à tous et Merry Christmas ! Le gui pend aux solives des bistros : mais la poix qu’on en sort agglutine les puddings. Ma concierge offre aux enfants de l’emballeur un escarpin en sucre avec Jésus dedans.

Sur les ottomanes des gargotes, la Vénus vulgivague prépare au pharmacien des matinées heureuses. Car c’est un fait de notoriété : le réveillon conduit ses officiants chez l’apothicaire, demain, pour l’Hunyadi-Janos et, dans huit jours, pour le proto-iodure. Les journaux à images fourmillent d’histoires dévotes, accommodées en « Christ