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ses lectures n’ont jamais eu la connaissance pour objet. Il n’a jamais ouvert un bouquin par curiosité, par besoin de savoir. C’est un scholar qui hante les bibliothèques, y cherche des citations oratoires, des textes propres à coller Jules Guesde ou Karl Marx. S’il avait été capable de lire autrement, s’il n’était pas le produit synthétique et représentatif du néant fomenté par les grandes Écoles — un navet pour tout dire, et de la moins savoureuse espèce — il ne méconnaîtrait pas les origines françaises du socialisme qui, par Vauban, Quesuay, l’abbé de Saint-Pierre, Mably, Rousseau et tous les philosophes du xviiie siècle, sans omettre Voltaire ni Montesquieu, ni Louis XVI lui-même, qui parlait aussi bien que Marat de sa « vive sensibilité », nous arriva dans les gloses de Saint-Simon, d’Auguste Comte, de Fourrier, — de tous les rationalistes contemporains.

Ajoutez à cette culture l’âme la plus servile, une déférence nègre pour l’ordre établi, et, brochant là-dessus, l’infatuation du quidam, généralisée comme un eczéma le long de sa personne.

M. Paul Deschanel est un sot. Mais la politique, dont il est certes le plus mince infusoire, ne manque ni d’assises