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toutes les petites filles, ce qui fait beaucoup de bien au pays ; aussi bien que le collège des Jésuites pour l’instruction de toute la jeunesse dans ce pays naissant. »

Ce témoignage d’un fait qu’il a admis lui-même, d’un fait patent, donné par un homme comme M. Boucher, inflige à M. Sulte des éructations qu’il décharge, au bas de la page, dans une note qui se lit ainsi :

« Instruction religieuse ; car les Jésuites avaient à peine songé à ouvrir des classes pour les fils d’habitants. »

Notons que c’était en 1663, alors que bon nombre de jeunes gens, fils d’habitants, étaient déjà sortis de chez les Jésuites avec une excellente éducation, quelques-uns même, après avoir fait un cours complet d’études classiques.

Je le demande au lecteur sérieux tant soit peu de bonne foi, fût-il ennemi acharné des prêtres : Quelle confiance peut-on avoir dans un auteur capable de semblable effronterie, de pareille atteinte à la vérité, de pareil mépris de sa propre dignité ? Quel respect peut-on avoir pour une œuvre ainsi faite ?

À propos de cette même citation de l’ouvrage de M. Boucher, dans ce même endroit, M. Sulte insère encore une autre note de bas de page qui démontre l’incapacité totale dans laquelle il se trouve de comprendre nos ancêtres, les anciens habitants. M. Boucher dit qu’il y a à Québec « une bonne forteresse et une bonne garnison » et qu’« on a vécu assez doucement » jusque-là. M. Boucher parle naturellement, eu égard aux circonstances ; cette vie douce qu’il mentionne, c’est la vie morale, il le dit, il l’explique, en plusieurs endroits de son mémoire, il en fait honneur à Mgr de Laval, aux Jésuites et aux autres prêtres. M. Sulte, lui, qui s’imagine toujours que nos aïeux vivaient dans la chair de poule, à cause des Iroquois, et qui a l’air de faire bon marché de l’instruction religieuse, de la piété et du dévouement chrétiens des premiers Canadiens, inscrit ce commentaire :

« Il est difficile de s’expliquer de pareilles assertions, même à la date de 1663 ; car le pays était encore en ce moment sous les coups des Iroquois, et les renforts de France commençaient à peine à nous arriver. »

Je ne veux pas suivre M. Sulte, à travers le dédale de ses inconséquences, de ses étourderies, de ses calomnies, de ses contradictions, de ses grossièretés et de ses gasconnades, je me contente de prendre, de ci de là, quelques passages qui suffisent amplement à faire apprécier l’écrivain et ses écritures.

En présence de tout cela, les regards de complaisante admiration, de béate contemplation, qu’il promène sur son œuvre et les œillades de souverain mépris qu’il lance, à tous les autres écrivains qui se sont occupés de notre histoire, deviennent d’un cocasse inimitable.