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mots où jamais n’avoient pensé. Mais je suis hors de peine de combatre ces noveos écriturs, puis que leurs conceptions sont seulement par Ipees, comme songes de malades.

Pour mettre fin à ce chapitre, j’avoy deliberé de rapporter la diversité de plusieurs caracteres qui sont aujourd’huy en usage, mais craignant d’estre trop long, je te r’envoye au petit livret de Postel De Phœnicum literis, & à ses tables De diversis caracteribus : comme aussi tu pourras voir Olauus Gothus in historia Septentrionali. Et ce afin que tu ne sois deceu de mesme erreur que Volaterran, lequel ayant trouvé des vieilles lettres Gothiques en des ruines, estimoit que c’estoient des anciennes Toscanes, desquelles on escrivoit du temps de la mere d’Evander. Mais s’il eust veu l’Alphabet des Goths, il ne les eust pas rapportées à la loüange d’Italie, & d’iceux fit si grand’ parade, encor qu’il ne se soit gueres equivoqué. Car il est certain que les Italiens d’aujourd’huy sont race de Goths & Barbares, & leur langage n’est autre chose que la corruption Latinogottisee du langage Romain. Non point que pour cela je vueille revoquer en doute la beauté de leur langue : que pleust à Dieu qu’ils eussent les âmes belles & nettes ! Or revenant à nos moutons, je vay conclurre par ce beau vers trouvé en la Bibliothèque Septimane :

Moses primus Hebraicas exarauit literas.
Mente Phœnices sagaci condiderunt atticas,
Quas Latini scripseramus, dedit Nicostrata,
Abraham, Syras, & idem reperit Chaldaicas,
Isis arte non minore protulit Ægyptias,
Uvaphila prompsit Getarum quas vidimus ultimas.

Lesquels vers j’ay ainsi mis en François, afin que chacun les peust facilement entendre.