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Lorsque Phœbus sue le long du jour,
Je me travaille en tourmens & ennuis,
Et sous Phœbe les languissantes nuits
Ne me sont rien qu’un penible sejour,
Ainsi tousjours pour l’amour de la belle
Je vay mourant en douleur eternelle.
Bien dois-je, helas ! de memoire eternelle
Me souvenir, & de l’heure, & du jour
Que je fus pris aux beaux yeux de la belle,
Car oncques puis je n’ay reçeu qu’ennuis,
Qui m’ont privé du plaisir & sejour
Des plaisans jours, ou reposantes nuicts.
Heureux amans, vous souhaittez les nuits
Avoir duree obscure & eternelle,
Pour prolonger vostre amoureux sejour,
Et à moy seul si rien plaist, plaist le jour,
Pour esperer apres mes longs ennuis,
Nourrir mes yeux aux beautez de la belle.
Mais rencontrant les soleils de la belle,
Tout esblouy, aux tenebreuses nuits
De mes travaux je r’entre, & aux ennuis
De ma pensee en son cours eternelle,
Laquelle fait tout moment, nuict & jour,
Dans les discours de mon esprit sejour,
Las ! je ne puis treuver lieu de sejour,
Tant j’ay de maux pour tes cruautez, belle,
Car si je brusle & ars le long du jour,
Je me dissous en pleurs toutes les nuicts,
Te voyant vivre en rigueur eternelle
Pour me tuer en eternels ennuis.
Inconsolable, ô ame, en tes ennuis
Qui veux sortir de ce mortel sejour