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question, violait les règles du Droit international. Sur ce mémorandum, Keitel, le 23 septembre, écrivit de sa main et parapha la note suivante : « On élève des objections inspirées par une conception chevaleresque de la guerre, mais il s’agit ici de détruire une idéologie. Par conséquent, j’approuve et soutiens ces mesures. » Keitel a déclaré qu’en réalité il était d’accord avec Canaris et qu’il avait discuté de cette question avec Hitler mais sans succès.

Keitel donna aux autorités militaires l’ordre de coopérer avec l’Einsatzstab Rosenberg pour le pillage des biens culturels dans les territoires occupés.

Lahousen a déclaré à la barre que Keitel lui avait dit, le 12 septembre 1939, dans le train spécial de Hitler, qu’il fallait supprimer la classe intellectuelle, la noblesse et les Juifs de Pologne. Le 20 octobre, Hitler dit à Keitel qu’on empêcherait les intellectuels de demeurer une classe dirigeante, que le standard de vie resterait peu élevé et qu’on n’utiliserait la Pologne que pour en tirer de la main-d’œuvre. Keitel ne se souvient pas de sa conversation avec Lahousen mais admet qu’une telle politique fut effectivement poursuivie et qu’il avait fait à ce sujet de vaines protestations auprès de Hitler.

Le 16 septembre 1941, il ordonna qu’aux attaques dont étaient victimes les soldats allemands dans l’Est, on répondît par la mise à mort de cinquante à cent communistes pour un soldat allemand, en ajoutant ce commentaire que « dans l’Est, une vie humaine était moins que rien ». Le 1er octobre, il donna l’ordre aux chefs militaires de détenir, en permanence, des otages prêts à être exécutés, pour le cas où des soldats allemands seraient attaqués. Terboven, commissaire du Reich pour la Norvège, ayant écrit à Hitler que la proposition de Keitel, tendant à rendre les parents des travailleurs responsables des actes commis par ces derniers, ne pourrait être appliquée que si l’on autorisait l’emploi de pelotons d’exécution. Keitel écrivit dans la marge de ce mémorandum : « Oui, c’est ce qu’il y a de mieux. »

Le 12 mai 1941, cinq semaines avant l’invasion de l’Union Soviétique l’OKW insista auprès de Hitler pour qu’il approuvât une directive de l’OKH, ordonnant à l’Armée de « liquider » les commissaires politiques. Keitel admet que cette directive fut transmise aux commandants en campagne. Le 13 mai, Keitel signa un ordre d’après lequel on devait exécuter sans jugement les civils que l’on soupçonnait d’avoir commis des crimes contre les troupes ; par contre on ne devait pas poursuivre les soldats allemands ayant commis les mêmes actes contre des civils. Le 27 juillet, on décida la destruction de toutes les copies de cet ordre, sans que, pour autant, celui-ci cessât d’être valable. Quatre jours avant, Keitel avait signé un autre ordre qualifiant d’insuffisants les châtiments légaux, et précisant que les troupes devaient user de méthodes terroristes.