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ser que nous avons de six à sept millions d’étrangers en Allemagne… Aucun d’eux ne sera dangereux pour autant que nous interviendrons sévèrement à la moindre bagatelle. »

Cependant en France, en Belgique, en Hollande et en Norvège, les Allemands essayèrent, au cours des deux premières années, d’obtenir les ouvriers nécessaires par un système d’engagements volontaires ; mais le procès-verbal de la réunion du Bureau central d’Études, en date du 1er mars 1944, montre à quel point ce volontariat n’était que théorique. La discussion suivante s’engagea, sur la situation en France, entre Sauckel et un certain Koehrl, représentant de Speer :

Koehrl. — « Pendant ce temps-là, un grand nombre de Français ont été recrutés et sont allés volontairement en Allemagne. »

Sauckel. — « Ce n’étaient pas toujours des volontaires ; quelques-uns ont été recrutés par la force. »

Koehrl. — « La conscription commença lorsque le recrutement volontaire ne donna plus de résultats suffisants. »

Sauckel. — « Mais sur les 5 millions de travailleurs qui sont en Allemagne, il n’y avait même pas 200.000 volontaires. »

Koehrl. — « Ne nous demandons plus, pour l’instant, s’il y eut ou non quelques pressions exercées. Théoriquement tout au moins, tous venaient spontanément. »

Des comités furent créés afin d’encourager le recrutement ; une énergique campagne de propagande fut entreprise pour inciter les travailleurs à aller, de leur plein gré, en Allemagne. On promettait, par exemple, la libération d’un prisonnier de guerre pour chaque départ volontaire d’un ouvrier. Bien plus, dans certains cas, on retira leurs cartes de rationnement aux travailleurs qui refusaient de se rendre en Allemagne ou on les renvoya en leur ôtant tout droit aux allocations de chômage et toute possibilité de travailler ailleurs. Parfois même, eux et leur famille étaient menacés de représailles par la police, s’ils refusaient de partir. Le 21 mars 1942, Sauckel fut nommé plénipotentiaire à l’utilisation de la main-d’œuvre ; ce titre lui conférait autorité sur « toute la main-d’œuvre disponible, y compris celle des travailleurs recrutés à l’étranger et des prisonniers de guerre ».

Sauckel se trouvait placé sous l’autorité directe de Göring, Commissaire au Plan de quatre ans, mais celui-ci, par un décret du 27 mars 1942, transféra à Sauckel toute son autorité sur la main-d’œuvre. D’après les instructions données à ce dernier, les ouvriers étrangers devaient être recrutés selon le principe du volontariat, mais ces instructions prévoyaient également que « si, néanmoins, un appel au travail volontaire ne donnait pas de résultats suffisants, il faudrait absolument recourir au service obligatoire et à la cons-