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ACTE V



Scène I


Stilicon, Mutian.

MUTIAN

Seigneur, dans un moment vous n’aurez plus de maître,
Nos conjurez enfin se vont faire connoître,
Et vous aviez bien lieu d’avancer un dessein,
Dont l’effet cette nuit pouvoit être incertain.
Outre qu’après l’éclat où l’on s’est vu contraindre,
Quelque Zénon encore étoit pour vous à craindre,
L’empereur par scrupule eut pu secrètement
L’aller passer ailleurs qu’en son appartement.
Tandis qu’enfermé seul avec le faux coupable,
Il rend l’occasion à nos vœux favorable ;
Jusqu’en son cabinet vingt des nôtres choisis
Sont allez par sa mort absoudre votre fils.
Sa garde est du complot, la plupart sont des nôtres,
Et le poignard soudain nous défera des autres ;
Le reste du parti dans le palais épars,
D’un tumulte imprévu préviendra les hasards ;
Ainsi tout est pour vous, et l’entreprise est sûre.

Stilicon

J’ai parlé contre un fils, j’ai trahi la nature,
Tu t’en es étonné, mais de moindres efforts
Ne m’eussent du projet laissé que le remords.
Pour le voir réussir, quelque horreur qu’il m’en coûte,
Il falloit de ma foi ne laisser aucun doute,
éblouir l’empereur, et surtout éviter
Que l’intérêt du sang ne me fit arrêter.