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Pour abattre un orgueil qui s’élevoit trop haut,
Je verrai sans regret mon fils sur l’échafaud,
Et s’il avoit pu fuir, il n’est retraite, asile,
Que je ne fisse effort à lui rendre inutile,
Et d’où mon zèle ardent ne vint avec éclat
Punir aux yeux de tous son indigne attentat.

HONORIUS

Ah, madame ! Admirez quel destin est le nôtre !
Je suis trahi par l’un, et vous l’êtes par l’autre.
J’ai beau vous rendre un frère, et n’oser le punir,
Je demande sa grâce, et ne puis l’obtenir,
Et trouve contre moi, quoi que je pense faire,
Et le crime du fils, et la vertu du père.
Sont-ce là, Stilicon, les tendresses du sang ?

Stilicon

Seigneur, le ciel m’oblige à venger votre rang.
Si mon fils est sans crime, il prendra sa défense.

EUCHERIUS

C’est dont un juste espoir flatte mon innocence,
Et dédaignant de fuir, au moins m’est-il bien doux
De me pouvoir par là montrer digne de vous.
Mais si ce sentiment mérite quelque grâce,
D’un zèle plein d’ardeur permettez-moi l’audace.
Quoi qu’on m’accuse à tort de vouloir attenter,
Quelque lâche conspire, et je n’en puis douter.
Le malheur de Zénon me le fait trop connoître ;
Dans un péril si grand ayez soin de mon maître,
Pour assurer ses jours ne l’abandonnez pas.

Stilicon

Va, va, confesse tout, tu les assureras ;
Mais enfin on craint peu tes lâches artifices,
Quand Felix en secret a nommé tes complices.
Vous aurez d’eux, seigneur, de nouvelles clartés,
Rufus et Pompejan déjà sont arrêtez.
Je venois vous l’apprendre.

HONORIUS

Ils m’ôteront de doute.
Mais accepte ma grâce avant qu’on les écoute,