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Puis qu’armant contre moi sa plus fière rigueur,
Vous êtes sûr d’en perdre, ou la cause, ou l’auteur.
D’une ou d’autre façon ma mort est nécessaire,
Je suis par moi coupable, ou le suis comme père,
Qui détournant de moi l’attentat entrepris,
Ne puis être innocent des crimes de mon fils.
C’est moi qui dans son cœur lui donnant la naissance,
En dois avoir jeté l’effroyable semence,
Enraciné l’instinct, et coulé dans son sang
L’abominable ardeur de vous percer le flanc.
Comme avec la vie il l’a de moi reçue,
De ce sang malheureux la source est corrompue,
Et si rien jusqu’ici n’en semble être connu,
C’est que de mes forfaits le temps n’est pas venu.
Que ma mort au plutôt, seigneur, vous en délivre ;
Ils pourroient éclater si vous me laissiez vivre,
Et cédant au destin qui nous entraîne tous,
Ma main peut-être, hélas ! Attenteroit sur vous.
Ainsi puisque ce sang me rend de tout capable,
Vous pouvez sans erreur me traiter en coupable.
Prononcez, et par là daignez me dérober
Au péril des forfaits où je pourrois tomber.

HONORIUS

Qu’en vain en t’accusant ta tendresse de père
Cherche à croître une erreur qui me seroit trop chère,
Si dans ce qu’à mes yeux ta vertu vient offrir,
Cent preuves de ta foi me la pouvoient souffrir !
Qui s’est dans mon jeune âge empêché d’entreprendre,
Ne me peut envier ce qu’il a su me rendre,
Et plus à ces clartés je tâche à résister,
Moins leur cruel éclat me permet de douter.
Je vois… te le dirai-je, et ma juste colère…

Stilicon

Oui, seigneur, accablez un misérable père,
Sur ce cœur affligé portez les derniers coups,
Tout ce que vous voyez je le vois comme vous.