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Chéri de tout son peuple, adoré dans sa cour,
Autorisât la haine à le priver du jour ?

HONORIUS

Il l’a fait toutefois, et Zénon…

Stilicon

Quoi, le traître,
Zénon, l’ingrat Zénon attente sur son maître,
Et ce que tout l’enfer verroit avec horreur,
Il cherche à s’immoler un si bon empereur ?
Ah, sans daigner l’ouïr de peur qu’il vous fléchisse,
Ne commettez qu’à moi l’ordre de son supplice,
Et ne vous laissez pas la triste liberté
De consulter son crime avec votre bonté.

HONORIUS

À trop d’emportement ton zèle te dispense ;
Tu parles de supplice où je dois récompense,
Et ton avidité d’en voir punir l’auteur,
Impute un parricide à mon libérateur.
Oui, bien loin que Zénon à ma mort s’autorise,
C’est lui dont je reçois l’avis de l’entreprise,
Et sa fidélité qu’il n’a pu démentir,
Du péril que je cours cherche à me garantir.

Stilicon

Il vous en donne avis ? Mais achevez, de grâce,
De quel lâche assassin doit-on craindre l’audace ?

HONORIUS

C’est ce que son billet ne m’a point fait savoir.

Stilicon

Et je m’arrête encore ? Seigneur, il faut le voir,
Ignorant le coupable on pourroit vous surprendre.

HONORIUS

L’ordre est donné, demeure, on me va tout apprendre.
Et du nom d’un ingrat tu prends un vain souci
Si devant toi son crime est prêt d’être éclairci.
Mais quel est ce désordre où ton cœur s’abandonne ?
Tu sembles interdit, ton courage s’étonne !