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ACTE II



Scène I


Placidie, Lucile.

PLACIDIE

Quoi, pour un trône offert par l’hymen qu’on propose
Aux soins d’Eucherius je devrois quelque chose,
Et lui donnerois droit de pouvoir se flatter
D’avoir prêté la main à m’y faire monter ?
Non, non, quand son conseil m’assure une couronne,
Je me dois le refus dont la fierté t’étonne,
Et tu prétends en vain que je puisse aujourd’hui
Faire paroître une âme aussi basse que lui.

LUCILE

Quelle bassesse d’âme éclate dans ce zèle
Dont l’ardeur toute pure au trône vous appelle ?
Sans trop d’emportement, qu’y pouvez-vous blâmer ?

PLACIDIE

La lâcheté d’un cœur qui feignit de m’aimer,
Et qui du plus beau feu s’imposant la contrainte,
En affecta les soins sans en sentir l’atteinte.

LUCILE

Soupçonner dans le sien des sentiments si bas,
C’est en prendre pour lui qu’il ne mérite pas.
Sitôt qu’à vos souhaits on offre un diadème,
Il fait gloire pour vous de se trahir soi-même ;
D’un hymen qui le perd il va presser l’aveu,
Et dans ce grand effort vous doutez de son feu ?

PLACIDIE

Par un éclat trompeur cet effort t’a charmée.
On doit tout immoler à la personne aimée,