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Les Chefs qu’il a reçus t’ôtent cette espérance,
De Tiribase même ils ont su ma naissance,
Et certains du secret ils sauront malgré toi
Choisir entre nous deux leur véritable Roi.

AMESTRIS

Et si je te disois, que n’osant plus le taire,
Tiribase m’en fit seule dépositaire,
Et qu’avec certitude, et sans aucun abus,
Je sais que Codoman est le vrai Darius ?

MÉGABISE

Parlez, feignez, Madame, aidez au stratagème.

AMESTRIS

Seigneur, ce que j’ai dit est la vérité même.
Depuis deux ans entiers que Tiribase est mort,
Je suis, sans qu’il l’ait su, maîtresse de son sort.
Avant que d’expirer il m’apprit quel mystère
Confondoit Codoman et le Fils de mon Frère,
Et que déjà fameux par cent nobles travaux
Le sang de Darius animoit un Héros ;
Qu’ayant vu sa vertu remplir son espérance,
Il l’avoit averti de sa haute naissance,
Mais à condition qu’un hymen glorieux
Le pourroit seul remettre au rang de ses Aïeux.
Voilà sur quoi, Seigneur, j’ai travaillé sans cesse
À lui faire élever ses vœux à la Princesse,
Sans qu’il pût même encor soupçonner aujourd’hui
Que de ce qu’il est né je susse plus que lui ;
Et si sur ce grand bruit qu’un Fourbe a su répandre,
Je l’eusse enfin connu capable d’entreprendre,
Il ne m’auroit jamais entendu publier
Ce qu’un autre que moi ne peut justifier.

OCHUS

Et bien, traître, est-ce assez pour ordonner ta peine ?

MÉGABISE

Oui, si l’on en consulte et ta rage et ta haine ;
Mais Tiribase ailleurs fait un autre rapport.

AMESTRIS

Consens-tu que sa main en décide le sort ?