Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 2, 1748.djvu/503

Cette page n’a pas encore été corrigée
DARIUS

Aucun autre jamais n’en montra de plus hauts.

MÉGABISE

Cent Amis qu’en mon sort un vrai zèle intéresse,
Ne m’ont point comme vous soupçonné de bassesse ;
Sans autre témoignage ils m’ont cru sur ma foi.

DARIUS

Ils seroient scrupuleux s’ils perdoient comme moi.

MÉGABISE

Mais tantôt votre amour s’est montré plus crédule.
Me croyant Darius, vous étiez sans scrupule ?

DARIUS

C’est que ce Darius n’aspirant qu’à régner,
Je ne voyois alors qu’un Trône à dédaigner.
Mais ici qu’il s’agit de m’ôter la Princesse,
Le seul objet pour qui mon cœur s’intéresse,
Puisque de votre rang j’ose me défier,
Il n’y faut point prétendre, ou le justifier.

MÉGABISE

Je le pourrois sans peine, et suspect d’imposture
Il me seroit aisé d’en convaincre l’injure ;
Mais après un soupçon que ma vertu confond,
Ne vous éclaircir pas, c’est en venger l’affront.

DARIUS

Un Trône ébranle bien la vertu la plus forte.

MÉGABISE

Vous pouvez me connoître, et parler de la sorte ?

DARIUS

Oui, mon cœur en effet croit vous connoître assez,
Mais j’ai lieu de douter si vous me connoissez.

MÉGABISE

Ah ! Ce peu de respect en qui sait ma naissance…

DARIUS

Ne vous emportez point à tant de violence,
Et pour la modérer, voyez, voyez en moi
L’Héritier d’un Empire, et le Fils d’un grand Roi.
Par divers intérêts j’en cache ici la gloire ;
Puisque je vous le dis, c’est à vous de m’en croire