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OCHUS

D’un pareil sentiment l’injustice m’offense ;
Croire trop souhaiter, c’est borner ma puissance,
Ou douter que je veuille, après tes grands exploits,
M’acquitter en vrai Roi de ce que je te dois.
Parle, et puisqu’à ton choix ma faveur abandonne
Tout ce qu’à mon pouvoir a soumis la Couronne,
S’il est rang, dignité, biens, trésors…

DARIUS

Oui, Seigneur,
Un précieux trésor feroit tout mon bonheur,
L’espoir seul qui m’en flatte a droit sur ma franchise ;
Et puisqu’à m’expliquer votre aveu m’autorise,
Le cœur de la Princesse est le prix glorieux
Où va de mes désirs le vol ambitieux.

OCHUS

Quoi, ma Fille ?

DARIUS

Je sais qu’une pareille audace,
À voir ce que je suis, est indigne de grâce ;
Mais quand vous m’y forcez, que dois-je appréhender
Des promesses d’un Roi qui veut tout m’accorder ?
Au moins à sa vertu, pour s’expliquer entière,
J’ai la gloire d’offrir une illustre matière,
Et crains moins de faillir à ne me point borner,
Qu’à lui demander moins qu’il ne me veut donner.

OCHUS

Quand j’ai pressé pour vous ma bonté de paroître,
J’ai cru qu’en vos désirs vous sauriez vous connoître,
Et n’y souffririez pas un outrage à mon rang
Que tout autre que vous expieroit de son sang.

DARIUS

Seigneur, si la Princesse est un prix où sans crime
L’espoir ne peut porter un orgueil magnanime,
Vous n’avez rien d’ailleurs qui ne soit au-dessous
De ce qu’un zèle ardent m’a fait faire pour vous.