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Vois par là si j’éprouve un destin bien contraire
Quand le vrai Darius s’arme contre mon Frère,
Ou qu’un Fourbe prenant ce grand nom pour appui,
Te dispute le droit de régner après lui.

DARIUS

Ah ! Pour tant de bontés je n’ai qu’une âme ingrate,
Si je crains devant vous que mon secret n’éclate,
Et balance un aveu qui vous doit arracher
Au scrupule inquiet où vous semblez pencher.
Cessez, cessez enfin de paroître alarmée
D’un nom qui fait juger une ligue formée,
Vous la craindrez bien peu si vous tirant d’abus
J’ose dans Codoman vous montrer Darius.

AMESTRIS

Ô Dieux !

DARIUS

Oui, vous voyez ce Prince déplorable
Qu’Ochus sur sa naissance au berceau tint coupable,
Et qu’eût perdu sans doute un ordre plein d’horreur
Si Tiribase eût craint de tromper sa fureur.
Il me sauva la vie, eut soin de mon enfance,
Et m’ayant éprouvé digne de ma naissance,
Ne me la déclara qu’après un fort serment
De ne rien découvrir de cet événement,
Et de ne souhaiter jamais le Diadème
Que par l’heureux accord que vous pressez vous-même.

AMESTRIS

Je ne m’étonne plus de ces transports secrets
Qui m’ont fait jusqu’ici prendre vos intérêts.
De tout votre destin obscurément instruite,
La Nature agissoit sur sa propre conduite,
Et pour vous rétablir dans votre premier rang
Pressoit sans le savoir le suffrage du sang.

DARIUS

Hélas ! Si sur Ochus il n’a le même empire,
Mon espoir le plus doux par son refus expire,