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Et ne se sont permis cet espoir téméraire
Que par l’abus d’un nom dont la mémoire est chère,
Mais leur audace en vain fait vivre Darius.
L’imposture est grossière, et ce Prince n’est plus.
Tiribase à son Roi fut toujours trop fidèle.

MÉGABISE

Recevez dans son Fils un garant de son zèle ;
Pour négliger votre ordre et trahir votre espoir
Tiribase, Seigneur, connut trop son devoir.
Cent fois j’ai reçu de lui qu’en un âge si tendre
Sa main trembla du sang qu’il lui fallut répandre,
Qu’un premier mouvement altéra tout le sien,
Mais il servoit son Prince, et n’examina rien.

OCHUS

Si mon scrupule alors en combattit le crime,
Du grand Art de régner j’ignorai la maxime,
Et je vois bien enfin qu’à maintenir leurs droits
Les timides vertus sont indignes des Rois.
Darius fut mon Frère et le Fils d’Artaxerse,
Sa mort me donna droit à l’Empire de Perse,
Mais je le vis mal sûr à vouloir épargner
Ce qui resta d’un sang qui cessoit de régner.
Son Fils pour l’affermir mérita de le suivre,
Pour le bien de l’État il dut cesser de vivre.
Le Peuple contre nous eût tout osé pour lui,
Puisque pour son Fantôme il s’émeut aujourd’hui.
Je sais que tout est faux, mais si de l’artifice
Je découvre, ou l’Auteur, ou le moindre Complice,
Ce qu’ont de plus affreux les plus cruels trépas
Laissera peu d’ardeur pour de tels attentats.

MÉGABISE

Il est juste, Seigneur ; d’une si noire audace,
C’est par des flots de sang que le crime s’efface,
Et le Ciel trahira les soins que je vous dois,
Si vous le découvrez par d’autres que par moi.

OCHUS

Je sais quel est ton zèle ; agis, cher Mégabise,
Préviens de nos Mutins l’insolente entreprise,