Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 2, 1748.djvu/468

Cette page n’a pas encore été corrigée
MÉGABISE

Ah, que pour nos esprits l’Amour a peu de force
Quand de l’ambition ils ont goûté l’amorce !
De ses bouillants désirs l’impérieuse ardeur
Avecque tyrannie occupe tout un cœur,
Et l’orgueil qu’elle inspire à ce cœur téméraire,
Pour être écouté seul, force tout à se taire.
Je l’avouerai pourtant ; d’abord de secrets nœuds
Aux beautés d’Amestris acquirent tous mes vœux,
Elle en reçut l’hommage, elle approuva ma flamme,
Et c’est par où glissa ce poison dans mon âme.
Je crus qu’ayant su plaire à la Sœur de mon Roi,
Le Trône n’avoit rien qui fût trop haut pour moi.
Soudain à cette ardeur pressé de satisfaire,
Je vis pour la remplir l’attentat nécessaire ;
Je sus des Mécontents, j’animai leur courroux,
Et d’un nom glorieux… Mais le Roi vient à nous.


Scène III


Ochus, Statira, Mégabise, Oropaste, Barsine, Bagoas.

OCHUS
,
à Statira.

Va, d’un Peuple insolent laisse agir le murmure,
Laisse-le d’un Fantôme embrasser l’imposture,
Ma Fille, on trouvera moyen de l’arrêter.

STATIRA

Seigneur, j’ai lieu pour vous de m’en inquiéter,
Comme ce bruit lui plaît, la suite en est à craindre.

OCHUS

Le feu n’ira pas loin avant que de s’éteindre.
C’est de quelques Mutins l’imprudente chaleur
Qui pour brouiller l’État cherchent une couleur,